24.2 C
Kinshasa
Friday, September 27, 2024

L’approche discrète du candidat Daniel Chapo avec Paul Kagame et ses implications pour le Mozambique

Le récent rapprochement discret entre Daniel Chapo, probable futur président du Mozambique, et Paul Kagame, président du Rwanda, marque un tournant significatif dans la politique régionale et la gestion des enjeux sécuritaires en Afrique australe. Ce geste soulève plusieurs questions stratégiques concernant l’avenir du Mozambique, notamment dans la province riche en gaz de Cabo Delgado, où des intérêts nationaux et internationaux sont en jeu.

Contexte politique et sécuritaire du Mozambique

Le Mozambique est un pays confronté à de nombreux défis internes, notamment l’insurrection islamiste dans la province de Cabo Delgado depuis 2017. Ce conflit a déstabilisé la région, perturbé les projets d’exploitation gazière et poussé le gouvernement à solliciter l’aide internationale. Des forces militaires étrangères, notamment rwandaises et de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), sont intervenues pour sécuriser la zone.

>> Lire aussi : MOZAMBIQUE : L’ARMÉE RWANDAISE DÉPLOYÉE À CABLO DELGADO AU CŒUR DE TENSIONS

Daniel Chapo, candidat du parti au pouvoir, le Frelimo, pour les élections d’octobre, joue une « carte sécuritaire essentielle » pour consolider sa base de soutien, en particulier dans le contexte de cette insurrection prolongée. La situation à Cabo Delgado, un « enjeu économique et sécuritaire majeur » pour le pays, nécessite des réponses rapides et efficaces, et Chapo semble avoir pris l’initiative de se tourner vers des partenaires extérieurs comme le Rwanda.

Le rôle croissant du Rwanda dans la sécurité en Afrique australe

Sous la direction de Paul Kagame, le Rwanda s’est progressivement imposé comme un acteur clé dans la sécurisation de certaines régions du continent. L’envoi de troupes rwandaises pour aider à stabiliser Cabo Delgado en 2021 a été une « décision stratégique majeure », illustrant l’expansion de l’influence militaire du Rwanda au-delà de ses frontières traditionnelles. Kigali a, en effet, gagné en crédibilité sur la scène internationale grâce à son efficacité dans la gestion de crises sécuritaires régionales, ce qui en fait un partenaire recherché par des États en difficulté.

Dans ce contexte, le rapprochement de Daniel Chapo avec Paul Kagame semble indiquer une volonté de renforcer la « coopération entre le Mozambique et le Rwanda ». Kagame, devenu le « parrain de la sécurité » dans la région gazière de Cabo Delgado, est perçu comme un acteur fiable et capable de maintenir la stabilité dans cette zone, ce qui est crucial pour les projets d’exploitation du gaz naturel.

Les intérêts géopolitiques en jeu

Le discret rapprochement entre Chapo et Kagame doit être interprété dans un cadre géopolitique plus large. La province de Cabo Delgado est une région stratégique pour les compagnies internationales, notamment en raison des importantes réserves de gaz naturel offshore qui y ont été découvertes. Les grandes entreprises énergétiques, telles que TotalEnergies et ExxonMobil, ont un intérêt direct à la pacification de la région pour poursuivre l’exploitation de ces ressources.

Le Mozambique, en tant que futur exportateur majeur de gaz naturel liquéfié (GNL), a donc besoin d’un environnement stable pour attirer et maintenir les investissements étrangers. En se rapprochant du Rwanda, Daniel Chapo semble parier sur l’efficacité des forces rwandaises pour assurer cette stabilité à court et moyen terme, tout en envoyant un message de continuité aux investisseurs internationaux. Cela pourrait également être une manière de montrer à la communauté internationale que le Mozambique est prêt à s’appuyer sur des alliés africains, plutôt que de dépendre exclusivement des forces occidentales.

>> Lire aussi : L’ÉMERGENCE DU RWANDA EN RCA : UNE NOUVELLE CONCURRENCE POUR WAGNER ?

Les implications pour la souveraineté et l’autonomie du Mozambique

Cependant, cette alliance avec le Rwanda pose des questions sur la souveraineté du Mozambique. L’intervention de troupes étrangères, même amies, soulève des inquiétudes quant à la « dépendance sécuritaire » de Maputo envers des puissances extérieures. En permettant une telle influence du Rwanda, Chapo et son gouvernement risquent de « céder une part de leur contrôle sur des questions stratégiques, ce qui pourrait affecter leur autonomie à long terme ».

De plus, cette relation pourrait entraîner des tensions avec d’autres partenaires régionaux ou internationaux, qui pourraient percevoir le rapprochement Mozambique-Rwanda comme une alliance trop exclusive, au détriment d’autres collaborations, notamment avec la SADC. Le Mozambique devra donc équilibrer cette relation tout en conservant ses liens avec les autres pays de la région pour éviter une marginalisation au sein des structures de « coopération africaine ».

Les enjeux électoraux pour Daniel Chapo

D’un point de vue purement politique, cette visite discrète à Kigali est également un geste fort pour Chapo. En sécurisant le soutien tacite de Kagame, il montre qu’il est prêt à prendre des mesures concrètes pour résoudre la crise de Cabo Delgado, une question prioritaire pour la population mozambicaine. Le succès de sa campagne dépendra en partie de sa capacité à rassurer les électeurs sur sa gestion des questions sécuritaires et économiques.

Ce rapprochement peut donc être interprété comme un moyen pour Chapo de renforcer sa stature présidentielle en tant qu’homme d’État pragmatique et soucieux de la sécurité de son pays. Il envoie également un signal à ses opposants politiques, montrant qu’il est en mesure de nouer des alliances internationales qui peuvent avoir un impact direct sur la situation sécuritaire du pays.

Toutefois, il reste à voir si cette alliance avec le Rwanda sera suffisante pour endiguer l’insurrection dans cette province gazière et si elle n’entraînera pas des conséquences inattendues sur la souveraineté et les relations diplomatiques du Mozambique avec ses autres voisins. Le rôle croissant de Paul Kagame en tant qu’acteur sécuritaire en Afrique australe pourrait également redessiner les équilibres régionaux, avec le Rwanda jouant un rôle de plus en plus central dans les crises africaines.

Didier Sangara

LNL News 2024, Tous droits réservés.

Guinée: la présidence dément des “coups de feu” près du palais présidentiel

La présidence de Guinée a démenti jeudi que des "coups de feu" avaient été tirés près du palais présidentiel dans la capitale Conakry, où...

LEAVE A REPLY

Please enter your comment!
Please enter your name here

Articles les plus populaires

TRANSLATION