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Friday, October 18, 2024

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Afrique : Pouvoir durable, enjeux stratégiques et accès aux ressources

Les puissances étrangères – qu’il s’agisse de puissances occidentales, asiatiques ou de blocs régionaux – soutiennent souvent des régimes africains pour des raisons variées. Les intérêts géopolitiques, comme l’accès à des ressources naturelles (pétrole, minerais, terres rares), le maintien de bases militaires stratégiques ou la lutte contre le terrorisme, sont parmi les principales motivations. Ce soutien prend diverses formes : aides financières, assistance militaire, coopération diplomatique ou approvisionnement en technologie sécuritaire. Dans certains cas, « les régimes africains servent de relais à la stratégie globale des puissances, notamment dans des zones jugées sensibles comme le Sahel, la Corne de l’Afrique ou l’Afrique centrale, le Golfe de Guinée et le Corridor est-africain ».

Conserver le pouvoir en échange d’un engagement sur des enjeux stratégiques et l’accès aux ressources naturelles stratégiques de la région, telle est l’implication des plusieurs présidents africains souvent qualifiés de « bons élèves de l’Occident ».  

Paul Biya (Cameroun), au pouvoir depuis 1982. Rôle : Paul Biya est l’un des dirigeants les plus anciens au pouvoir en Afrique. Sa relation avec les puissances occidentales, en particulier la France, a été renforcée par son soutien à la lutte contre le terrorisme, notamment contre Boko Haram dans la région du lac Tchad. Sous son régime, le Cameroun est resté un allié stratégique pour l’Occident en Afrique centrale.

Yoweri Museveni (Ouganda), au pouvoir depuis 1986. Rôle : Museveni est un allié clé de l’Occident dans la lutte contre le terrorisme en Afrique de l’Est, notamment contre les groupes islamistes somaliens comme Al-Shabaab. Son gouvernement a reçu un soutien militaire et financier de pays occidentaux pour stabiliser et imposer le militarisme tutsi dans la région des Grands Lacs.

Idriss Déby (Tchad), au pouvoir de 1990 à 2021 (décédé en 2021). Rôle : Déby était un partenaire stratégique de la France et d’autres puissances occidentales en raison de la position géographique du Tchad, au cœur du Sahel. Il a joué un rôle clé dans les interventions militaires contre les groupes djihadistes au Mali et dans la région du lac Tchad. Son régime, bien qu’autocratique, était soutenu pour ses efforts de stabilisation régionale.

Ali Bongo Ondimba (Gabon), au pouvoir depuis 2009 (et héritier du régime de son père Omar Bongo qui a dirigé de 1967 à 2009). Rôle : Le Gabon est un acteur stratégique pour l’Occident, notamment pour la France, en raison de ses ressources pétrolières. Le régime de la famille Bongo a maintenu une relation étroite avec Paris, qui considère le Gabon comme un point d’ancrage économique et militaire en Afrique centrale.

Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire), au pouvoir depuis 2011. Rôle : Ouattara, ancien fonctionnaire du FMI, est perçu comme un technocrate pro-occidental. Après la crise post-électorale de 2010-2011, la France et d’autres pays occidentaux ont soutenu son accession au pouvoir. Depuis, il a mis en œuvre des réformes économiques libérales qui ont fait de la Côte d’Ivoire une puissance économique régionale.

Macky Sall (Sénégal), au pouvoir depuis 2012. Rôle : Le Sénégal est considéré comme l’un des pays les plus stables et démocratiques en Afrique de l’Ouest. Macky Sall, tout en étant respecté pour sa gestion intérieure, a également renforcé les liens avec l’Occident, notamment dans la lutte contre le terrorisme au Sahel et dans les efforts de consolidation régionale à travers des organisations comme la CEDEAO.

Faure Gnassingbé (Togo), au pouvoir depuis 2005. Rôle : Faure Gnassingbé a hérité du pouvoir après la mort de son père, Gnassingbé Eyadéma, qui a dirigé le Togo pendant 38 ans. Le Togo entretient des relations solides avec la France et l’Union européenne, et joue un rôle modéré dans la stabilité régionale en Afrique de l’Ouest.

Ismaïl Omar Guelleh (Djibouti), au pouvoir depuis 1999. Rôle : Djibouti est stratégiquement situé sur la côte est de l’Afrique, à l’entrée de la mer Rouge. Le pays abrite des bases militaires françaises, américaines et chinoises, et sert de plaque tournante pour la lutte contre la piraterie et le terrorisme dans la région. Le régime de Guelleh a su utiliser cette position pour maintenir un soutien international, tout en consolidant son pouvoir.

Mohamed Ould Abdel Aziz (Mauritanie), au pouvoir de 2008 à 2019. Rôle : Sous son régime, la Mauritanie est devenue un partenaire important pour la France et les États-Unis dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. Bien que son régime ait fait l’objet de critiques pour son autoritarisme, il a réussi à maintenir une coopération étroite avec l’Occident, notamment dans les domaines sécuritaires et militaires.

Teodoro Obiang Nguema Mbasogo (Guinée équatoriale), au pouvoir depuis 1979. Rôle : Le président Obiang est l’un des plus anciens dirigeants en Afrique. Malgré un régime marqué par la corruption et la répression, il a su préserver des relations étroites avec l’Occident, en particulier grâce aux ressources pétrolières de la Guinée équatoriale. La stabilité de son régime assure l’accès des entreprises occidentales à ces ressources.

Ces présidents, bien que critiqués pour leur longévité au pouvoir et leurs pratiques autoritaires, ont su maintenir des relations solides avec les puissances occidentales en raison de l’importance géopolitique de leurs pays ou de leur engagement dans des questions stratégiques, notamment la lutte contre le terrorisme et l’accès aux ressources naturelles. Le soutien occidental à ces dirigeants est souvent justifié par la stabilité qu’ils apportent dans des régions clés du continent africain.

Une survie fragile des régimes sous « perfusion »

La dépendance envers les puissances étrangères comporte plusieurs risques. En premier lieu, elle affaiblit la souveraineté nationale, car les régimes deviennent prisonniers des intérêts des puissances qui les soutiennent. Par exemple, ces régimes se trouvent souvent contraints de signer des accords commerciaux ou d’autoriser des concessions qui favorisent les entreprises étrangères au détriment du développement local.

Si le soutien des puissances étrangères prolonge l’existence d’un régime, il ne fait que repousser l’inévitable pour plusieurs raisons :

Isolement populaire : Le soutien extérieur est souvent perçu par les populations comme une ingérence, surtout lorsque les conditions de vie ne s’améliorent pas ou empirent. Cela alimente le ressentiment populaire, fragilise la légitimité interne du pouvoir et renforce les mouvements de contestation ou de résistance armée.

Absence de réforme : Les régimes bénéficiant de ce soutien sont souvent réticents à entreprendre des réformes profondes. Ils se reposent sur cette aide au lieu de moderniser les institutions, diversifier l’économie ou renforcer la cohésion nationale. Le soutien externe devient alors une béquille qui empêche toute évolution structurelle.

Lorsque le soutien extérieur cesse ou se retourne, les régimes deviennent extrêmement vulnérables. Les exemples récents incluent la chute de Blaise Compaoré au Burkina Faso, qui a vu son soutien occidental se dissiper suite à des manifestations massives. Compaoré, par exemple, a été renversé par une insurrection populaire après 27 ans de règne, lorsqu’il a tenté de modifier la Constitution pour rester au pouvoir plus longtemps. Une des caractéristiques des régimes soutenus par des puissances étrangères est que leur chute, lorsqu’elle survient, est souvent brutale et déshonorante. Les dirigeants de tels régimes finissent fréquemment exilés, chassés par des révolutions populaires ou renversés par des coups d’État, sans avoir laissé un héritage politique positif. L’exemple de Mohamed Siad Barre en Somalie, dont la chute a plongé le pays dans une guerre civile prolongée, ou celui de Mobutu, dont la fin de règne s’est soldée par l’effondrement de l’État zaïrois, illustre cette réalité.

Une fin honorable : un idéal difficile à atteindre

Dans les conditions actuelles, il est difficile pour les présidents africains de connaître une fin honorable comme les George W. Bush, Bill Clinton, ou Jacques Chirac. Les contextes politiques et historiques sont fondamentalement différents. En Occident, les institutions sont solidement ancrées et les transitions pacifiques de pouvoir sont la norme. Mais en Afrique, où les structures de pouvoir sont faibles, les rivalités ethniques et politiques sont exacerbées, et les intérêts extérieurs dictent souvent la marche à suivre, il est beaucoup plus difficile de créer les conditions d’une alternance pacifique et honorable.

Cependant, cela ne signifie pas que c’est impossible. Pour éviter une fin brutale, les présidents africains doivent :

  • Diminuer leur dépendance aux puissances étrangères, en particulier lorsqu’elles imposent des conditions qui ne correspondent pas aux intérêts du pays ;
  • Favoriser un dialogue inclusif au sein du pays, afin de construire une base de soutien qui ne repose pas uniquement sur la coercition ou la répression ;
  • Assurer une transition progressive en préparant une relève crédible et en établissant des institutions suffisamment solides pour assurer la continuité après leur départ.

Il est extrêmement rare qu’un président africain puisse se retirer avec honneur après un long mandat. Les exemples récents d’assassinats ou de coups d’État, comme celui du président Ibrahim Baré Maïnassara du Niger en 1999, montrent que même ceux qui essaient de jouer selon les règles ne sont pas à l’abri de la violence politique.

De plus, Samuel Doe au Liberia, après avoir dirigé le pays dans une dictature sanglante, a subi une fin particulièrement brutale, capturé et torturé en direct à la télévision. Milton Obote, président de l’Ouganda, a été renversé par deux coups d’État, et Thomas Sankara, qui prônait un modèle de développement indépendant et anti-impérialiste, a été trahi et assassiné par son propre compagnon de lutte, Blaise Compaoré.

Ces exemples démontrent que même ceux qui tentent de s’éloigner des modèles traditionnels de dépendance envers l’Occident ou de maintien de régimes autocratiques ne sont pas à l’abri des violences, soit par des révoltes internes, soit par des interventions extérieures.

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