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Friday, September 27, 2024

Crise au Tigré : un grand tournant en Éthiopie sur la Justice internationale 

Le directeur de la Commission des droits de l’homme local, l’Ethiopian Human Rights Council (EHRC)Daniel Bekele et le ministre éthiopien de la justice Gedion Timothewos participent dès ce mardi 18 juillet et jusqu’au jeudi 20, à Nairobi (Kenya) à une réunion fermée sur la justice transitionnelle en Ethiopie, organisée par les Nations unies. Au cours de cette réunion, les victimes du conflit du Tigré (2020-2022) y compris les exilés et les ONG basées en Éthiopie comme Human Rights First doivent prendre la parole pour s’exprimer. Egalement les administrateurs des bureaux régionaux de la justice y prendront part.

Sont également attendus à ces assises, les membres de la Commission internationale des Experts en droits de l’homme (ICHREE), qui ont été nommés par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies (CDH) en 2021. Depuis la signature d’un accord de paix en novembre 2022, le gouvernement éthiopien a profité de cette occasion pour défendre son modèle de « maison » de justice transitionnelle, que le ministre de la justice vend sans hésitation aux grandes puissances étrangères du pays et qu’il va d’ailleurs défendre à plate couture dans ces assises de Nairobi. 

Des travaux forts critiqués par le chef du gouvernement Abiy Ahmed qui a tenté à tous les coups de les enterrer avant même sa mise en œuvre. Ce dernier a même empêché l’équipe des experts de se rendre sur des sites présumés de violation des droits humains, et n’a invité ses membres qu’une seule fois à Addis-Abeba.

Des options politiques 

En novembre 2022, l’Éthiopie signe un accord de paix. En janvier 2023, le gouvernement annonce dans un document ses “options politiques” en matière de justice transitionnelle. Mais en février, il tente de mettre fin à une commission d’experts de l’ONU qui a mis en évidence de possibles crimes de guerre et crimes contre l’humanité dans la guerre du Tigré. Un signal d’alarme, dans un pays où les initiatives de justice ont échoué dans le passé.

Tadesse Simie Metekia, spécialiste éthiopien des crimes internationaux et de la justice transitionnelle, estime que l’initiative du gouvernement sur la question de la justice transitionnelle est un bon premier pas car l’Éthiopie a un besoin urgent de justice et de réconciliation. L’Éthiopie sort d’une guerre brutale de deux ans entre le gouvernement fédéral et le Front de libération du peuple du Tigré (FLPT), une région située dans le nord du pays.

Des forces érythréennes étaient également impliquées au côté du gouvernement, ainsi que des milices, notamment dans la région d’Amhara. On estime que jusqu’à 600 000 personnes ont été tuées en deux ans, et que des milliers d’autres ont été déplacées ou poussées à l’exil. Un blocus gouvernemental sur le Tigré a privé ses habitants de nourriture et de services essentiels, laissant la survie d’une grande partie de la population aux seules mains de l’aide humanitaire. Chacune des parties au conflit a dénoncé des viols, des tortures et d’autres atrocités. Selon la commission d’experts des Nations unies sur l’Éthiopie, ces actes pourraient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.

ICHREE en difficultés

La Commission internationale d’experts sur les droits de l’homme (ICHREE) exerce dans ce pays avec beaucoup de difficultés. Cette commission d’experts est presque fin mandat. D’ici le mois d’octobre, son mandat d’intervention dans le cadre de la crise au Tigré prendra fin en Éthiopie et à l’allure où vont les choses il reste de ne pas être renouvelé. Selon nos informations, la commission a déjà commencé à réduire ses opérations en prévision de cette hypothèse de non renouvellement de son mandat à travers le pays. Un accord de paix a été signé en novembre 2022 entre le gouvernement et le Front de libération du peuple du Tigré (FLPT) à Pretoria sous les auspices de l’Union africaine semble tenir pour l’instant. Les troupes érythréennes se sont retirées de la plupart des régions du Tigré, mais “pas entièrement”.

L’accord stipule que “le gouvernement éthiopien mettra en œuvre une politique nationale globale de justice transitionnelle visant à la responsabilisation, à l’établissement de la vérité, à la réparation des victimes, à la réconciliation et à l’apaisement, conformément à la Constitution de la FDRE (République démocratique fédérale d’Éthiopie) et au cadre stratégique de l’Union africaine en matière de justice transitionnelle“. 

Malheureusement, la pression venant du gouvernement et qui pèse sur l’ICHREE qui est l’une des deux seules commissions d’enquête internationale sur les abus commis pendant la guerre au Tigré a poussé à ses animateurs d’interrompre sa mission depuis le mois de juin dans le de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP). 

Addis-Abeba pour ou contre la justice transitionnelle?

L’Éthiopie aurait besoin d’un soutien international sous forme de financement et d’expertise. Mais c’est une question sensible. “Il est important que le processus soit pris en charge par le pays et que les acteurs internationaux, les donateurs et les experts soient en mesure de respecter cela, afin que le gouvernement puisse le faire avancer et que les Éthiopiens considèrent qu’il s’agit bien d’une solution nationale”, explique Metekia expert éthiopien des crimes internationaux et de la justice transitionnelle. 

Entre-temps, le gouvernement a refusé l’accès aux zones situées en dehors de la capitale à la Commission d’experts des Nations unies sur l’Éthiopie, l’accusant de “rhétorique incendiaire”. Cette question sera probablement soulevée lors de la session actuelle du Conseil des droits de l’homme des Nations unies à Genève, devant laquelle elle doit présenter un rapport. Le gouvernement éthiopien a déjà rejeté le rapport préliminaire que la commission a présenté au Conseil des droits de l’homme en septembre dernier et qui fait état de possibles crimes de guerre et crimes contre l’humanité dans la guerre du Tigré, y compris de la part du gouvernement fédéral. L’Éthiopie n’est pas membre de la du Statut de Rome, le traité international qui a conduit à la création de la Cour pénale internationale (CPI) en 1998.

De ce fait, les auteurs du rapport estiment que “la seule alternative rationnelle” est de faire juger les crimes par les juridictions nationales, tout en soulignant la nécessité de ” réformes institutionnelles ” et en accordant une importance particulière à la formation judiciaire. Le Statut de Rome permet pourtant qu’un pays puisse accepter de se soumettre à la juridiction de la CPI même sans y adhérer. Le ministre éthiopien de la justice, Gedion Timothewos, et le vice-premier ministre, Demeke Mekonnen, en première ligne sur ce dossier, n’ont jamais caché leur volonté de privilégier un modèle national de justice transitionnelle. 

©2023 – Paulin AGANZE, LNL NEWS

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