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Élection à la BAD : La Candidature de Swazi Tshabalala Redéfinit les Enjeux

L’élection à la présidence de la Banque Africaine de Développement (BAD) a pris une tournure inattendue. Alors que la Communauté de Développement de l’Afrique Australe (SADC) avait désigné le Zambien Samuel Munzele Maimbo comme candidat unique, l’Afrique du Sud a surpris le continent en soutenant sa propre candidate, Bajabulile Swazi Tshabalala. Cette décision bouleverse les équilibres régionaux et remet en cause l’unité traditionnelle de la SADC dans cette élection. Swazi Tshabalala devient ainsi la cinquième candidate officiellement en lice pour prendre la tête de l’institution financière la plus influente d’Afrique, rendant cette course à la présidence plus imprévisible que jamais.

La rupture au sein de la SADC

Depuis des décennies, la SADC, qui regroupe 16 pays d’Afrique australe et centrale, a pour habitude de voter en bloc lors des élections à la BAD. Pourtant, avec plus de 14 % des droits de vote, cette coalition régionale vole aujourd’hui en éclats. L’Afrique du Sud, qui détient plus de 5 % des voix à la BAD, a choisi de rompre cette unité en présentant sa propre candidate, Swazi Tshabalala. Ce revirement traduit un malaise avec la candidature de Samuel Munzele Maimbo, un Zambien qui a fait l’essentiel de sa carrière à la Banque mondiale.

L’Afrique du Sud n’a pas vu d’un bon œil l’association de Maimbo avec David Malpass, l’ancien président de la Banque mondiale, proche de Donald Trump et souvent accusé de climatoscepticisme. Ce lien, ainsi que l’impression que Maimbo représente une approche trop technocratique et déconnectée des réalités africaines, a poussé Pretoria à opter pour une candidature plus alignée sur sa vision régionale et continentale.

Swazi Tshabalala, un parcours impressionnant et un enjeu de parité

Bajabulile Swazi Tshabalala n’est pas une nouvelle figure à la BAD. En poste depuis 2018 en tant que vice-présidente chargée des finances, elle a été nommée vice-présidente principale en 2021, devenant ainsi la première femme à occuper ce poste à ce niveau de responsabilité au sein de l’institution. Sa candidature semble s’inscrire dans la continuité des deux mandats du président sortant, Akinwumi Adesina, avec qui elle a collaboré étroitement.

Pourtant, cette continuité pourrait lui porter préjudice. De nombreux actionnaires non régionaux, représentant 40 % des droits de vote, souhaitent un candidat de rupture capable de réformer la banque de fond en comble, plutôt que de prolonger l’ère Adesina. Cependant, le fait que Swazi Tshabalala soit la seule femme en lice pourrait jouer en sa faveur dans un contexte où la parité et l’inclusion sont devenues des priorités pour les institutions internationales.

Selon plusieurs analystes, la BAD n’a jamais été dirigée par une femme, et cette candidature pourrait offrir une image de renouveau, au-delà des simples réformes institutionnelles. Son expérience à la tête des finances de la BAD et sa stature internationale font d’elle une candidate sérieuse, mais elle devra convaincre à la fois en Afrique et parmi les actionnaires non africains, qui détiennent une influence considérable dans cette élection.

Une élection au cœur d’enjeux géopolitiques

Le choix du prochain président de la BAD ne concerne pas seulement les questions économiques et financières. Cette élection, qui se tiendra en mai 2025 à Abidjan, est hautement politique. La BAD, en tant que première institution de financement du développement sur le continent, joue un rôle clé dans la gestion des crises économiques, sanitaires et climatiques. Elle est également un acteur essentiel pour mobiliser des ressources en faveur des infrastructures vertes et des petites et moyennes entreprises (PME) africaines.

Swazi Tshabalala rejoint une liste de candidats où figurent des noms prestigieux, comme Samuel Munzele Maimbo, Romuald Wadagni, le ministre béninois de l’Économie et des Finances, Amadou Hott, ancien ministre sénégalais, et Abbas Mahamat Tolli, ex-gouverneur de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC). Cette multiplication des candidatures complique encore plus la course, et plusieurs pays envisagent de présenter d’autres candidats avant la clôture des candidatures en janvier 2025.

Cette élection intervient dans un contexte international marqué par une crise économique mondiale, exacerbée par la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine. Le rôle des institutions financières internationales, comme la Banque mondiale et le FMI, a été critiqué pour leur manque d’action face à l’explosion de la dette des pays en développement et à la montée des inégalités. Le mandat de David Malpass, président sortant de la Banque mondiale, a été particulièrement controversé. Sous sa direction, la BM a été jugée trop prudente dans ses prêts, évitant les financements risqués pour maintenir sa notation AAA, au détriment des pays les plus vulnérables.

Les réformes à venir de la Banque mondiale et leurs conséquences pour la BAD

David Malpass quittera ses fonctions en juin 2024, un an avant la fin de son mandat. Son départ a relancé les discussions sur les réformes nécessaires pour mieux répondre aux défis contemporains. Les critiques de son mandat, notamment celles formulées par Janet Yellen, secrétaire au Trésor des États-Unis, ont mis en lumière la nécessité pour la BM d’adopter une vision plus large et de mobiliser davantage de ressources pour faire face aux crises mondiales, notamment en Afrique.

Sous Malpass, la Banque mondiale a certes approuvé des aides massives, totalisant plusieurs milliards de dollars pour soutenir les systèmes de santé, les filets de sécurité sociale et les PME africaines. Cependant, cette action est jugée insuffisante face à l’ampleur des besoins. La BAD devra composer avec cet héritage et prendre des mesures pour répondre aux attentes croissantes des pays africains, en matière de financement des infrastructures, de lutte contre le changement climatique et de résilience économique.

Swazi Tshabalala, si elle est élue, aura la lourde tâche de piloter la banque dans un contexte de demande accrue de financements pour le développement durable. Elle devra également renforcer les partenariats avec des institutions multilatérales comme la Banque mondiale et le FMI pour maximiser les ressources disponibles pour le continent africain.

Une élection pleine de suspense

L’élection à la présidence de la BAD en 2025 sera l’une des plus disputées de son histoire. Le processus pourrait durer plusieurs tours de scrutin, chaque voix comptant dans un jeu d’alliances complexe. Les tractations politiques et les négociations en coulisses seront intenses, avec des enjeux majeurs pour le développement économique de l’Afrique. Le prochain président devra non seulement maintenir la crédibilité de la banque, mais aussi répondre aux exigences de transparence et d’efficacité dans un contexte de crises globales.

Les candidats déjà déclarés, comme Romuald Wadagni et Amadou Hott, ont tous des parcours solides et des soutiens régionaux importants. Wadagni, en particulier, peut se prévaloir d’une croissance économique soutenue au Bénin malgré les crises mondiales, et de réformes économiques réussies, notamment la restructuration de la dette publique. Amadou Hott, quant à lui, bénéficie du soutien de plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, et son expérience dans le secteur de l’énergie et du changement climatique pourrait peser dans la balance.

En revanche, Samuel Munzele Maimbo, bien que soutenu par la SADC, devra surmonter les critiques liées à son passé à la Banque mondiale et son association avec David Malpass. Son manque de proximité avec le terrain africain pourrait jouer contre lui, même s’il bénéficie d’un soutien fort de sa région.

Le suspense demeure entier jusqu’à l’élection, prévue lors des Assemblées annuelles de la BAD en mai 2025. La question de la succession d’Akinwumi Adesina, qui a marqué la banque par son dynamisme et son engagement en faveur du développement, reste ouverte. Une chose est sûre : le futur président de la BAD aura un rôle crucial à jouer pour l’avenir du continent, et la capacité des candidats à nouer des alliances et à obtenir des soutiens, tant en Afrique qu’au niveau international, sera déterminante.

Conclusion

L’élection de 2025 à la BAD cristallise de nombreux enjeux, tant régionaux qu’internationaux. La candidature de Swazi Tshabalala, première femme à briguer ce poste, redessine l’échiquier et oblige les autres candidats à revoir leur stratégie. En choisissant de rompre avec la SADC et en soutenant une candidature féminine, l’Afrique du Sud a pris un pari audacieux qui pourrait bien payer. Mais la route vers la présidence est semée d’embûches, et les alliances politiques détermineront le succès ou l’échec de chaque prétendant. Le continent africain, en pleine mutation, attend son prochain leader à la tête de la BAD pour relever les défis complexes qui l’attendent.

© 2024 – LNL News, Odon Bulamba

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