Le président Paul Kagame a fait ou cherche à renforcer la place du Rwanda sur la scène continentale, voire internationale, passant par deux secteurs phares du pays : la finance et l’armée. Tout ceci dans le but de se positionner au cœur du grand jeu des nations. Désormais, toutes les affaires africaines passent par Kigali ou se disputent au Rwanda.
En créant le centre financier du Rwanda [Kigali International Financial Centre-KIFC], Paul Kagame a fait du Rwanda le « hub de la finance africaine ». KIFC veut être « le dénominateur commun est l’orientation panafricaine et le centre financier des investissements africains ».
Bpifrance [la Banque publique d’investissement française, ayant pour mission le financement et le développement des entreprises] est en relation avec le nouveau centre financier mis en place par le gouvernement rwandais et l’agence publique de développement britannique fait la promotion du Centre.
Bank of Kigali a bénéficié des clients du nouveau centre financier du Rwanda, et le financier américain, Marc Holtzman préféré des présidences africaines – s’est imposé à plusieurs postes clés pour la finance africaine au Rwanda et au Zimbabwe.
Kigali est la capitale des investisseurs étrangers
Le centre financier de Kigali se rapproche du modèle de Singapourien. Kagame a imité la cité-Etat asiatique, pour faire son pays la référence mondiale en matière de « finance offshore ». Un compte offshore est un compte ouvert dans une banque à l’extérieur de son pays de résidence, dans un territoire considéré comme un « paradis fiscal ». Concrètement, un paradis fiscal sur lequel les non-résidents ou les entreprises ont des avantages financiers qui amènent à une fiscalité réduite voire nulle. À quoi il faut ajouter le paradis bancaire [qui pratique l’opacité bancaire] et le paradis réglementaire [qui ne demande pas d’où provient l’argent].
Le président rwandais, Paul Kagame a signé un partenariat de facilitation des affaires entre le Rwanda et le Singapour (Financial Trust Corridor). Depuis 2008, le Singapour aide Kigali à la régulation du secteur bancaire et financier à travers un traité entre KIFC et la Monetary Authority of Singapore (MAS).
Ce rapprochement avec le Rwanda a permis au géant indo-singapourien du négoce agricole « Olam » de s’implanter au Rwanda.
Kigali a recouru aux professionnels de la Belgique, du Royaume-Uni et du Pays-Bas qui travaillent au Rwanda pour l’efficacité du centre financier. Les fonds d’investissement créé par Afreximbank pour favoriser le « commerce inter-africain », le siège de l’Institution est installé à Kigali. Le Fonds FEDA (Fund for Export Development in Africa) d’Afreximbank réside à Kigali.
Le Rwanda tente de devenir le siège des « fonds Afrique » du Qatar. Le Centre financier de Kigali en septembre 2021 cherché à accueillir le Fonds de la Qatar Investment Authority (QIA) pour l’Afrique sub-saharienne.
Et le Centre financier international de Kigali (KIFC) attend des investisseurs en provenance du Luxembourg et de la Suède, alors qu’il se positionne comme place de choix pour les investissements en Afrique. Le fonds veut utiliser le pays comme un « hub » lui permettant d’investir dans la dette obligataire des PME africaines. La place doit bénéficier des accords internationaux et des réformes législatives mises en place par Kigali.
Toujours au Rwanda, des gestionnaires de fonds d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique australe ont fait des demandes de licence pour ouvrir des structures au Rwanda.
LE RWANDA N’EST PAS SEULEMENT UN LIEU DE TRANSITION DE RESSOURCES MAIS UN ENDROIT OU LES TALENTS SE RENCONTRENT.
En novembre, KIFC a annoncé la création du Virunga Africa Fund I, d’une valeur de 250 millions de dollars, dont les principaux investisseurs sont Qatar Investment Authority et le Rwanda Social Security Board (Fonds de pension public).
En février, KIFC a attiré un fonds de fintech africain lancé par l’investisseur sud-africain Vusi Thembekwayo. Le fonds cherche à lever un montant initial de 50 millions de dollars, l’objectif final se situant entre 100 et 120 millions de dollars. Vu de Kigali, cela montre que le Rwanda est mieux placé que l’Afrique du Sud en tant que centre d’investissements transfrontaliers.
Savoir-faire militaire
Sur le continent Africain, à part d’être responsable du service de renseignement de l’Union africaine (UA) au côté du Nigeria, Kigali apporte son savoir-faire militaire sur le continent. Le président Paul Kagame s’appuie sur une structure tournée vers les opérations militaires extérieures, mais aussi vers des pays alliés hors du continent (Centrafrique, Soudan du sud, Congo Brazzaville et Mozambique). L’armée rwandaise combatte au Mozambique. De Banqui à Maputo, le Rwanda a fait de ses forces armées un « instrument de sa diplomatie africaine ».
L’intervention du Rwanda à Cabo Delgabo a permis de relancer la construction du mégaprojet de gaz liquéfié mené par le géant français, TotalEnergies. Ce qui justifie même l’octroi d’aide de 20 millions de dollars par l’Union européenne (UE) pour appuyer l’armée rwandaise au Mozambique. « Le Rwanda joue le relais des grandes puissances sur le continent Africain ».
La France poursuit ses efforts de normalisation des relations diplomatiques avec le Rwanda, à travers l’ébauche d’un « programme de coopération militaire » qui s’intensifie en RDC dans les zones occupées par le groupe rebelle étranger du M23. Et le rapprochement Macron-Kagame s’inscrit dans le cadre de business. Ce qui justifie cette agitation et la multiplication des opérations françaises au pays de mille collines.
© 2023 – Didier Amani SANGARA, LNL News