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Friday, October 18, 2024

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Kitchanga, un foyer de la violence armée à l’Est de la RD Congo

Les conflits armés à l’Est de la RDC tirent leur origine de divers héritages historiques qui sont constamment « invoqués, contestés et réinterprétés dans un contexte d’insécurité permanente ». Si un certain nombre de dynamiques génériques prédominent, la zone autour de Kitchanga présente un « ensemble unique de trajectoires croisées qui continuent à se développer, malgré les nombreux efforts locaux et internationaux pour promouvoir la paix dans le pays ».

La zone de Kitchanga reste le principal centre urbain d’un espace plus large couvrant les chefferies de Bashali, dans le Masisi et de Bwito dans le Rutshuru. Cette zone est « marquée par des dynamiques de violence et de dépossession depuis l’époque coloniale ». Les tensions foncières et identitaires qui en ont découlé, ont contribué à faire du nord du Masisi et de l’ouest du Rutshuru l’un des principaux « épicentres des petites et grandes guerres du Congo ».

Il est indispensable de comprendre la politique violente dans cette région pour appréhender le remodelage de l’accès à la terre et de la propriété foncière, ainsi que les continuités problématiques des économies coloniales de concession et de conservation.

Dans ce récit, notre analyse se limite sur les questions foncières, les conflits, l’identité et les déplacements.

Entre les années 1908 – 1910, un décret colonial a « créé » des chefferies et sous-chefferies indigènes, cédant ainsi le « pouvoir aux autorités coutumières étrangères sur papier », mais non sans s’immiscer dans les nominations et les lignées héréditaires, et obliger les chefs à s’engager dans des systèmes de taxation hybride (s’ils avaient la prérogative de taxer la population, cela s’accompagnait de l’obligation de percevoir des taxes pour le pouvoir colonial).

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Les décrets coloniaux du 17 juillet 1914 (imposant l’usage de la force pour l’acquisition de terres) et du 30 mai 1922 (monétisant le marché foncier) ont « influencé la sphère du pouvoir coutumier en matière de vente et d’acquisition de terres ».

Les Banyarwanda Hutu et Tutsi à Masisi et à Kalehe – Nyamasasa

La gestion migratoire belge des années 1920 à 1935, a ensuite modifié les modèles flexibles de migration et de conquête. La fixation des frontières et des identités, ainsi qu’une politique de diviser pour régner qui « favorisait certains chefs tout en en affaiblissant d’autres, et qui élevait de nouveaux chefs tout en écartant les anciens, ont modifié le paysage coutumier et politique dans la partie Est de la RDC ». Un décret colonial a proclamé, le 31 mai 1934, que les terres appartenaient à l’État colonial et que les chefs coutumiers devaient être indemnisés pour celles-ci, ce qui a conduit à la création de ce que l’on appelle les « cités indigènes et les centres extra-coutumiers ».

Et pour faire fonctionner la grande économie des plantations coloniales, les autorités coloniales belges ont fait venir de la « main d’œuvre au Congo issue de la région rwandaise sous leur colonie ». « L’administration coloniale a poussé l’autorité locale du territoire de Masisi créé en 1935, à céder 349 km2 aux immigrés comme indiqué dans l’acte de cessation de 1939 ».

Gishari, la chefferie fantôme des Banyarwanda au Nord-Kivu ?

La terre cédée aux immigrés Banyarwanda (Hutu et Tutsi) a contribué à la création ou l’établissement de la « chefferie éphémère de Gishari », créée autour de la localité de Nyamitaba sous la direction du chef Bideri, qui dépendait du roi rwandais de l’époque, Mutata III Rudahigwa, puis de Kigeri V. La fameuse chefferie comprenait l’actuel Bashali-Kaembe et des parties de Bashali-Mokoto ainsi que le groupement de Biiri, aujourd’hui disparu. C’est ici, où les chemins s’entrecroisent, là où le mensonge du royaume Nyiginya du Rwanda (Ruanda) a eu naissance en disant qu’il avait occupé des parties ou entités territoriales dans le Masisi, Kalehe et Rutshuru au Kivu.

Gishari-Bashali, situé entre Kilolirwe et Kitchanga, est « devenu principalement habité par des Banyarwanda, les Bahunde s’étant déplacés vers les régions environnantes ». Buchanayandi, le successeur de Bideri et ses administrés tentèrent de se lancer à la conquête de nouvelles terres au détriment des populations autochtones. Des vives tensions s’ensuivirent aussitôt.

Le décret du 28 octobre 1942 illustre les tentatives coloniales de simplifier le rôle des chefs de communautés en matière de droits de propriété individuelle.

En 1949, le gouverneur de la province du Kivu, Antoine Liesnard, donnait cet avis au gouverneur général Pétillon« La création de la chefferie Gishari a été une erreur politique. Nous ne devons pas répéter l’erreur politique commise au Gishari. Les Banyarwanda viendront avec leurs notables, mais ils devront dépendre politiquement des autorités indigènes du Congo Belge. Nous ne pouvons spolier les autochtones de leurs terres, et nous devons tenir compte des droits réels des chefs du Congo Belge ».

Les décrets du 10 et 23 février 1953 stipulent que « l’immatriculation des terres occupées confère des droits de propriété qui ne peuvent être retirés que pour des raisons d’utilité publique ou de non-respect d’une clause de résiliation incluse dans le contrat ». Le décret du 13 octobre 1959 a justifié que les terrains situés en dehors du domaine privé appartiennent aux municipalités.

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Grâce à ces temporalités spécifiques (les résidents précoloniaux, les descendants de la MIB, les réfugiés, etc.) implantés au Congo pour servir de la main d’œuvre ou pas, la cour rwandaise a falsifié l’histoire. Si des entités plus petites ont effectivement été gouvernées par des mandataires ou des délégués rwandais, cela ne signifie pas que le Rwanda avait réussi à établir un contrôle territorial durable dans le Nord et le Sud-Kivu attribué faussement aux conquêtes de roi Rwabugiri à son passage dans le Masisi et dans le territoire de Nyiragongo.

Après la séparation des territoires de Masisi et de Walikale en 1954, Masisi n’était composé pendant un temps que d’une seule chefferie, conformément à un décret colonial général du 2 mai 1910. Au niveau du district du Nord-Kivu, le commissaire de district était assisté d’un assistant chargé de la MIB. Le Mwami Kalinda (et plus tard son fils Albert Shelukoo) dirigeait la chefferie de Bahunde. Le Mwami Bashali Nyanguba était le sous-chef à Bashali et Wilfrid Bucyanayandi le sous-chef à Gishari, entité reconvertie plus tard en groupement « Bashali-Kaembe » sous Kalinda Miteetso Shaberondo.

En 1958, un appel a été lancé par les chefs hunde pour refuser la nationalité aux rwandophones et déporter 50% de ces derniers au Rwanda. Lors des premières élections de 1959 (qui ont été entachées de complications à Masisi), les rwandophones se sont vus largement refuser l’accès au scrutin. Néanmoins, certains leaders comme Habarugira, Rwakabuba et Rwiyereka ont obtenu des postes de ministres provinciaux dans les institutions de transition, tandis que des politiciens Nande et Hunde comme Denis Paluku et Benezeth Muleyi ont dirigé l’administration provinciale.

©2024- Daniel MOMBELE, LNL News

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