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Friday, September 27, 2024

Le M23 : un instrument de « redéfinition des frontières » au service des ambitions rwandaises

Le mouvement M23, longtemps présenté comme une milice défendant les droits de la minorité tutsie en République démocratique du Congo (RDC), semble en réalité jouer un rôle bien plus large dans les ambitions géopolitiques du Rwanda. Derrière les discours officiels de protection des populations tutsies et de retour des réfugiés se cache peut-être une stratégie plus complexe visant à « redessiner la carte territoriale de la région des Grands Lacs », en particulier à l’est de la RDC, pour servir les « intérêts démographiques et économiques » du Rwanda.

La stratégie de Sultan Makenga : stabilisation régionale et retour des réfugiés Tutsis

Le général Sultan Makenga, le chef militaire du M23, adopte une approche plus localisée et pragmatique. Pour lui, l’objectif prioritaire n’est pas de s’emparer de Kinshasa, mais de stabiliser les zones sous contrôle du M23, en particulier Rutshuru, Lubero et Masisi, trois territoires du Nord-Kivu historiquement contestés, afin de permettre le retour des réfugiés tutsis rwandophones, qui revendiquent un « droit de réintégration sur les terres congolaises ». Cette stratégie reflète les « préoccupations ethniques et géopolitiques » qui sont au cœur du M23 depuis sa création.

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Le M23 a toujours été soutenu par le Rwanda, pays qui partage des affinités ethniques avec une partie des populations du Nord-Kivu. La rébellion est née en 2012 en grande partie en réaction à la marginalisation perçue des Tutsis congolais, et Makenga continue d’inscrire son action dans cette logique de « protection des intérêts tutsis ». Son objectif de créer un environnement stable dans ces régions vise à garantir la sécurité des réfugiés tutsis, nombreux à avoir fui les violences interethniques et les conflits régionaux.

Cette stratégie est, à première vue, moins ambitieuse que celle de Naanga, mais elle est en réalité plus réaliste compte tenu de la situation actuelle sur le terrain. Le M23 contrôle déjà certaines parties de ces territoires et a montré sa capacité à résister aux offensives des FARDC. En se concentrant sur la stabilisation de ces zones, Makenga cherche à consolider son « pouvoir local » et à obtenir des « concessions politiques à long terme », notamment sur le « statut des réfugiés tutsis » et la « gouvernance régionale ».

Le rôle ambigu du M23

Le M23, sous couvert de protection des minorités tutsies et de retour des réfugiés, apparaît comme un « instrument stratégique du Rwanda pour redessiner les frontières et accroître son influence dans la région des Grands Lacs ». La guerre qui se déroule dans l’est de la RDC dépasse de loin les simples enjeux ethniques, s’inscrivant dans un contexte géopolitique où le Rwanda cherche à renforcer son « contrôle territorial et à désengorger sa population ». Cependant, une analyse plus approfondie des actions et des alliances du M23 suggère que cette narrative pourrait masquer un agenda plus vaste, celui de faciliter une « expansion rwandaise déguisée en aide humanitaire ».

Sous le prétexte de protéger une minorité ethnique, le Rwanda pourrait en fait chercher à exploiter les tensions internes de la RDC pour augmenter son contrôle territorial, notamment dans les régions riches en ressources naturelles. Le fait que le Rwanda soit l’un des pays les plus densément peuplés d’Afrique, avec une superficie limitée, renforce cette hypothèse : Kigali pourrait chercher à désengorger sa population en s’étendant sur des territoires congolais moins peuplés.

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Une guerre aux multiples visages

Le M23 n’a pas seulement cherché à protéger les Tutsis congolais, mais aurait été conçu, avec l’aide du Rwanda, pour permettre une « réorganisation territoriale dans l’est de la RDC ». Le conflit, alors, ne vise plus seulement la chute du régime de Kinshasa, mais également la création d’un espace contrôlé et administré par des forces soutenues par Kigali.

L’enjeu « démographique rwandais » est essentiel pour comprendre cette stratégie. Le Rwanda, confronté à un manque d’espace et à une forte densité de population, pourrait chercher à « utiliser le Kivu comme un réservoir de terres pour sa propre expansion ». La région, riche en ressources naturelles telles que les minerais, offre également un potentiel économique qui pourrait bénéficier à l’économie rwandaise, tout en désengorgeant la pression démographique interne.

Il apparaît donc que le discours sur la protection des réfugiés tutsis en RDC pourrait cacher une réalité plus géopolitique : « celle d’une stratégie visant à créer un espace vital pour la population rwandaise, en utilisant le M23 comme un outil militaire et politique ». Ce mouvement servirait alors de bras armé à une politique d’expansion territoriale du Rwanda, qui cherche à accroître son influence dans l’est congolais.

Le M23 : outil de déstabilisation et d’expansionnisme

Officiellement, le mouvement prétend protéger les droits des Tutsis congolais, dénonçant leur marginalisation. En réalité, il est un instrument clé de la stratégie expansionniste du Rwanda, visant à affirmer son influence sur les riches régions du Nord-Kivu et du Sud-Kivu.

Le retour du M23 depuis 2021 s’inscrit dans une résurgence des tensions régionales. Malgré les dénégations de Kigali quant à son soutien direct au M23, de nombreuses preuves montrent que le Rwanda utilise ce mouvement comme levier pour maintenir une pression constante sur Kinshasa et les forces armées congolaises.

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La commune de Minembwe : une enclave tutsie dans le Sud-Kivu

La création de la commune rurale de Minembwe dans le Sud-Kivu, peuplée majoritairement de Banyamulenge (Tutsis congolais), illustre les dynamiques de territorialisation et d’expansion. Bien que le Rwanda ne soit pas directement impliqué dans la gestion de cette zone, l’installation d’une administration semi-autonome a suscité des tensions entre diverses communautés locales. Pour certains, Minembwe symbolise la reconnaissance des droits des Banyamulenge, tandis que pour d’autres, elle représente un risque de balkanisation, où certaines communautés sont perçues comme instrumentalisées par des puissances étrangères.

Daniel MOMBELE

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