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Friday, September 27, 2024

SENEGAL : OUSMANE SONKO, ADJI SARR ET LA SCENE DU CRIME

Ousmane Sonko, Adji Sarr et la scène du crime au Sénégal

Ousmane Sonko, symbole de l’opposition du président Macky Sall, a été arrêté il y a un peu plus d’un an pour des faits présumés de viols en série sur Adji Sarr, une jeune femme de 20 ans, et l’affaire a fait sensation dans les médias, indiquant un profond malaise au sein de la Noosphère sénégalaise.

Le conflit entre les deux hommes s’est largement cantonné aux deux dernières campagnes électorales législatives en 2017 et présidentielle en 2019 et est désormais diffusé en prime time. Ousmane Sonko, président du parti Pastef-Les Patriotes, et Macky Sall, chef de l’Etat depuis 2012 et fondateur de l’Alliance pour la République, se sont retrouvés dans la soirée du lundi 8 mars. (APR), se succédant sur la television Sénégalaise pour s’exprimer, chacun dans son style unique, sur la tempête de feu qui a secoué le pays début mars dans la capitale et d’autres grandes villes.

Un point d’accord entre les deux hommes : la nécessité d’avancer par des circonlocutions autour du dossier, qui a mis le feu aux poudres. Ousmane Sonko fait l’objet d’une ordonnance judiciaire lui interdisant de parler de l’affaire qui le vise et qui est à l’origine de cet extraordinaire pandémonium une accusation de viol portée par une adolescente employée d’un salon de massage qu’il fréquente qui pèse sur lui comme une épée de Damoclès, menaçant d’étouffer une brillante carrière politique.

La position de Macky Sall en tant que chef de l’État l’empêche de commenter publiquement une affaire judiciaire la séparation des pouvoirs l’impose. Le “clash” retardé entre les deux hommes a également évité l’incident de Sonko, leur permettant de revenir à l’essentiel. Ses rebondissements les plus récents peuvent servir d’exemple du célèbre principe cinquantenaire de Marshall McLuhan selon lequel “les médias sont le message” dans une classe d’école de journalisme.

D’une part, Macky Sall, 59 ans, est président du Sénégal depuis avril 2012 (et a été réélu pour un cinquième mandat en 2019), à la tête d’une coalition gouvernementale devenue si importante qu’elle a rendu l’opposition exsangue. 42 membres ou sympathisants du Parti démocratique sénégalais (PDS, opposition) emprisonnés depuis 2012, des militants de base aux plus hauts dirigeants, en 2016. Ce nombre n’a fait qu’augmenter depuis, avec des détentions visant à partis autres que le PDS. Aujourd’hui, parmi les ténors politiques qui se sont successivement ralliés au mouvement présidentiel (Assata Tall Sall, Modou Diagne Fada, Idrissa Seck, et autres), Et pour ceux qui ne peuvent pas se présenter aux élections (Karim Wade, Khalifa Sall, et peut-être demain Ousmane Sonko), le danger est clair : une élection présidentielle en 2024 sans adversaire… car il n’y a pas de challenger.

L’élection de 2019 avait prédit ce scénario, avec seulement quatre candidats face au président sortant (et seulement deux d’entre eux capables de présenter un danger), et 28 concurrents dont les candidatures ont été disqualifiées par le Conseil constitutionnel. Que Macky Sall brigue un troisième mandat ou nomme un dauphin, ce sera à son camp politique d’en décider. En attendant, pensez à ces paroles de Corneille du Cid : « Pour gagner sans danger, on triomphe sans gloire.

Si Netflix en faisait un film, le titre serait peut-être La Masseuse et le Politicien, avec deux sous-titres contradictoires : Viol armé et la Machination, selon les scénarios. Alors que l’enquête sur les faits de viols à répétition dont il est accusé par Adji Sarr, employé d’un institut de beauté dakarois, tourne inexplicablement en rond un peu plus d’un an après l’arrestation d’Ousmane Sonko et les émeutes par la suite, l’affaire est devenue un phénomène médiatique et le révélateur d’un profond malaise au sein de la noosphère sénégalaise.

Ousmane Sonko, contacté à plusieurs reprises depuis le début de l’année, a choisi de ne pas répondre, ce qui est son droit. Adji Sarr, qui, après mûre réflexion, a accepté de travailler par personne interposée avec la journaliste Marième Soumaré. Deux journalistes du Monde et de RFI ont eu la même idée, ce qui était bien la raison compte tenu du tempo médiatique. Résultat, le 1er et 2 mars, trois interviews du même Adji Sarr au contenu accablant ont été diffusées en moins de 48 heures. Il n’en fallait pas plus pour que les partisans du précédent candidat à la présidentielle de 2019, le maire de Ziguinchor, député déchu de son immunité et toujours sous contrôle judiciaire dans cette affaire, s’expriment sur le stratagème.

Le complot est bien résumé dans cette tribune qu’un enseignant, Mody Niang, qui se décrit comme un “intellectuel dévoué”, a écrit le 9 mars en le diffusant sur de nombreux sites sénégalais sous le titre “Stratégie pour détruire un concurrent potentiellement dangereux”. Qu’est-ce qu’ils voulaient vraiment avec ces trois médias? Est-ce qu’ils ont l’intention de commencer leur guerre contre la candidature de Pastef par des entretiens avec la très pieuse Adji Sarr, qui impliquent tous qu’ils ont planifiés et précisément préparés? Pour ceux qui ne le savent pas, le « PASTEF patriotes » est le parti politique d’Ousmane Sonko, et l’élection présidentielle de 2024 est l’échéance électorale pour laquelle il est candidat.

Les médias n’ont plus le droit d’assister aux conférences de presse de sonko puisqu’ils sont “étrangers sous mandat”. Lors d’une conférence de presse le 11 mars, c’est l’ancien inspecteur des impôts qui avait été licencié pour avoir accusé l’Etat d’irrégularités fiscales et budgétaires. Sonko déclare son intention d’écarter le média français des futures conférences de presse, les qualifiant d'”étrangers en mission” et les accusant d’être envoyés par “les Français” pour le saper. Il poursuit : « Ils ont investi beaucoup d’argent dans le parrainage de ces journaux, dont Jeune Afrique ».

Son refus d’assumer le rôle d'”esclave domestique” et son “discours anticolonial” en sont les raisons. Un déluge de propos venimeux, dont beaucoup sont insensés. Populiste autant que calomnieux ce raisonnement complotiste est bu par ses militants comme du vin de palme de Casamance : sans modération. Ousmane Sonko aurait bien du mal à donner la moindre preuve du parrainage auquel il fait allusion. Ce dernier a aussi découvert la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, enragé Paris et suscité les interviews d’Adji Sarr : le changement de nom de cinq rues de Ziguinchor, annoncé par le maire lui-même mi-février.

Le fait que les noms de trois officiers français du passé colonial, le général de Gaulle, et l’ancienne puissance impériale aient été rayés de l’environnement urbain de la métropole casamançaise aurait été vécu par la France comme un affront, selon les partisans de l’« anti -Candidat CFA. Il fallait punir l’auteur, peu importe que cette opération, qui relève de l’appropriation par les Sénégalais de leur propre histoire, n’ait suscité aucune protestation des autorités françaises. La concordance des temps est arrivée précisément au bon moment pour donner à cette intrigue une ampleur à la mesure de l’ego d’Ousmane Sonko.

Deux camps s’affrontent dans ce Sénégal où personne ne doute : ceux qui pensent “adji ment” et ceux qui croient que cette jeune femme de 20 ans dit la vérité. En conséquence, la justice doit prévaloir. Bizarrement, les militantes féministes défendant Adji Sarr n’ont pas eu la main heureuse en mettant en place un plan de communication qui prévoyait de faire appel à trois médias étrangers pour un tournage concentré de trois interviews simultanées. Ils ont offert à Ousmane Sonko l’occasion idéale de démasquer un complot et de faire dissimuler les propos d’Adji Sarr au profit d’un débat inutile sur son image médiatique. En conséquence, le médium est devenu le message dans ce cas.

L’affaire de viol impliquant l’opposant Ousmane Sonko est sans aucun doute le sujet le plus controversé au Sénégal en ce moment. Malgré cela, la consigne a été bloquée dès le départ. Le procès Adji Sarr contre Ousmane Sonko a refait surface un an après son premier éclatement. La jeune femme, qui affirme avoir été violée à plusieurs reprises par Ousmane Sonko entre fin 2020 et début 2021, aux médias qu’après avoir vécu “enfermée pendant plus d’un an” entre sa chambre et son salon, son souhait le plus cher est de voir l’affaire déboucher rapidement sur un procès.” Un espoir encore bien loin tant que la question, pourtant délicate, semble aujourd’hui enlisée.

D’autres personnes associées directement ou indirectement au monde politique, outre son ami Sidy Ameth Mbaye, semblent avoir joué le rôle de conseillers occultes à différentes étapes de l’incident. Adji Sarr affirme qu’elle n’est soutenue que par une organisation féministe qui souhaite rester inconnue pour des raisons de sécurité. Un haut responsable civil issu de la majorité aurait « sauté sur cette situation, qu’il a apprise en fin de journée et s’est lancé dans la précipitation pour casser Sonko », selon deux sources (l’une proche de la mouvance présidentielle et l’autre proche de l’opposition). C’est lui qui a insisté pour que la jeune fille dépose un rapport de police. Bien qu’elle affirme avoir peur et ne pas vouloir sortir en public de peur d’être ridiculisée ou même agressée, la jeune femme a récemment fait une pause pour travailler avec un photographe professionnel.

En effet, ses photographies ont été présentées dans des articles récents par des médias. Qui se sont chargés de la communication de cette jeune femme tout au long de ces entretiens alors qu’elle était sous la protection de la Brigade d’Intervention de la Police (BIP) ? Malgré les dangers qui pesaient sur elle et le fait que l’enquête n’avançait pas, qui a donné son assentiment à cette série de pièces largement reprises par la presse sénégalaise ? Son retour sur le devant de la scène, un an après son long entretien avec la chaîne Internet Leral TV, pourrait-il être bénéfique pour certains ? Adji Sarr est sous surveillance policière 24h/24 et ne peut recevoir aucun visiteur sans que les autorités en soient averties.

A l’heure actuelle, l’accusateur d’Ousmane Sonko a choisi de s’adresser à la presse pour réfuter tout plan contre lui et réaffirmer ses accusations. Cette employée de Sweet beauté spa a porté plainte auprès du commandant de la brigade de recherche de la gendarmerie de Colobane le 3 février 2021. Elle a alors accusé le député de l’avoir violée et menacée de mort dans le salon de massage de Dakar où elle travaillait à de multiples reprises. Tout le monde a peur. Ce fichier est divulgué par l’état lui-même. Lorsque la jeune fille se rend à l’Association des juristes sénégalais (AJS), qui défend depuis longtemps les droits des femmes, elle est refoulée. Même si j’avais tort, a-t-elle déclaré curieusement, c’est peut-être des gens de l’âge de ma mère qui m’ont soutenue, m’ont aidée à retrouver ma dignité. Je ne me suis pas considéré comme morte après ça parce que j’ai réalisé que personne ne pouvait me sauver. Tout le monde a peur d’être soupçonné d’être impliqué dans un complot.

L’Etat fuit cette affaire, assure Adji Sarr, qui affirme ne recevoir “aucune aide” de quiconque hormis une organisation anonyme qui paie ses dépenses quotidiennes. Adji Sarr a fêtée ses 20 ans le 3 mars 2022, de manière solitaire. Est-ce qu’un homme oserait sortir avec moi aujourd’hui ? Elle vient d’emménager dans un nouvel appartement décoré simplement et fait partie d’un petit comité. C’est mon anniversaire, mais c’est aussi le 14e anniversaire des émeutes qui ont fait 14 morts. Ce sera une journée éprouvante, elle ajouta. Les filles n’oseront plus parler devant des hommes puissants, lance la jeune femme, soucieuse de l’avenir et de la voix des femmes. Elle fait confiance à Dieu dans l’espoir que sa condition s’améliore. Se regardent comme des chiens de terre : ceux qui prétendent qu’Adji ment et ceux qui croient que cette jeune femme de 20 ans dit la vérité. Rares sont ceux qui ne sont pas d’accord. Même si l’acte d’accusation d’Ousmane Sonko est l’œuvre d’une puissance qui ne serait pas contente de le voir mêlé à une polémique des mœurs, à l’instar de Dominique Strauss-Kahn ou d’Anwar Ibrahim, les deux groupes ne s’affrontent pas sur un pied d’égalité.

Caractéristique des relations sociales dans les entreprises, les administrations et les universités, ainsi qu’un symptôme du privilège d’un homme d’influence et de l’expression de sa vitalité physique donc politique n’implique pas qu’Ousmane Sonko soit coupable des “viols répétés sous la menace d’une arme. L’acte d’accusation n’annule pas la présomption d’innocence, et seul un procès public a priori permettrait de distinguer ces deux mots qui, il est crucial de le noter, sont équivalents. On n’en est pas encore là : le juge d’instruction doit encore entendre les protagonistes et amis d’Ousmane Sonko, qui, piqués au vif par les précédents de Karim Wade et Khalifa Sall, n’hésitent pas à remettre en cause l’indépendance de la justice par rapport à l’exécutif Pouvoir.

Une femme de la terre et un homme du ciel. Cet incident, qu’Ousmane Sonko a qualifié de « fait divers » du 11 mars, est pourtant révélateur d’un certain nombre d’autres réalités qui touchent aux racines mêmes de la société sénégalaise. D’un côté, une “femme d’en bas” prétend que le génocide individuel du viol a profané son corps déchiqueté. D’un autre côté, il y a un “homme d’en haut” pour qui cette allégation n’est rien de plus qu’une cabale diabolique complotant sa disparition. Dans un Etat de droit, il n’y a pas d’autre solution que la justice pour que le message triomphe du médium. La jeune femme, célibataire et masseuse dans un institut de beauté, incarne une flopée de stéréotypes défavorables. Célibataire, travaillant dans un institut de beauté pour hommes comme masseuse à côté par ailleurs, Adji Sarr souligne une accumulation de stéréotypes négatifs à cet égard, de nombreux Sénégalais (dont des Sénégalaises) supposant que, même si un viol avait eu lieu, il n’y aurait pas de cause encombré les tribunaux. La pression sociale est si forte au Sénégal, comme dans toute l’Afrique, que la plupart des gens qui ont le courage de porter plainte se retirent tout au long du processus. La volonté d’Adji Sarr d’aller jusqu’au bout et d’exiger un procès est considéré comme une aberration, même s’il existe des preuves évidentes de son instrumentalisation. Le médium redevient le message et la gravité des faits s’évanouit au cœur d’un mécanisme politique dont les enjeux sont le pouvoir, la conquête et la conservation.

Eric Kuikende, LEO NJO LEO NEWS

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